Understanding Maghrebi Societies

LA PARTICIPATION SOCIALE ET POLITIQUE DES JEUNES :

PROBLÈMES PUBLICS, REPRÉSENTATIONS, CONTESTATIONS

Journées d’Études
IESA-CSIC (Cordoue, Espagne) / CJB (Rabat, Maroc)

28-29 Septembre 2017, CJB, Rabat.


Argumentaire

En Afrique du nord, si on suit les discours officiels et les rapports des institutions supranationales les plus influentes dans la région (PNUD, Banque Mondiale, Union Européenne, etc.), la participation politique et sociale des jeunes est devenue un enjeu.

Lire plus...
Bien que l’importance de la question de la jeunesse puisse varier selon les conjonctures, à plusieurs reprises au cours de la dernière décennie, les dirigeants de la région ont lancé des appels pour que les jeunesses de leurs sociétés s’impliquent dans la vie associative et participent aux élections. Or, d’après les données disponibles, il s’avère d’une part, que la majorité de ces jeunes ne vote pas et n’est pas engagée dans une association à but non lucratif. Toutefois, ces deux formes de participation n’épuisent pas les diverses modalités du puzzle d’actions que recouvre l’emploi de cette notion en sociologie politique. C’est en partant du constat du poids démographique de la jeunesse que le rôle de sa participation est mis en exergue dans les processus de construction de la citoyenneté et l’évaluation de la qualité des dispositifs démocratiques, voire dans la solution des maux de diverses natures qui toucheraient des pans entiers de cette catégorie de la population. Du chômage à l’émigration clandestine, de l’oisiveté aux comportements à risque, en passant par la radicalisation idéologique, la recherche de solutions adaptées à des problèmes aussi différents semble passer désormais par la participation des jeunes aux sein des organes de décision officiels, à l’élaboration des diagnostiques et des politiques publiques et à l’amélioration de la qualité des prestations envers les publics cibles. La citoyenneté active, la participation civique et la représentation associative et politique des jeunes doivent donc être encouragées. Elles deviennent des dimensions essentielles des réponses à apporter non seulement à des questions circonscrites, mais bien au-delà, puisqu’elles seraient au cœur des « dynamiques socio-économiques positives et de la stabilité politique des pays »: « Des jeunes (informés, autonomes et engagés) seront les leaders d’aujourd’hui et de demain du développement humain durable et les promoteurs de nations solides » . Ces discours ont en commun la construction de la jeunesse comme un problème social, doublé d’un problème politique. Leur diffusion ainsi que les initiatives et les programmes qui en découlent octroient à cette catégorie de la population la condition de problème public. Ce faisant, cette approche très normative doit être mise à l’épreuve d’une connaissance critique et pratique. Cela passe d’abord par la déconstruction des catégories et des concepts proposés et de la mise en lumière de leur pertinence dans une conjoncture donnée. Ainsi, la construction de la catégorie jeunesse n’est que rarement soumise à discussion. Or, en fonction des critères retenus tant l’importance numérique des jeunes au sein de la population générale d’un pays donné que leurs conditions, positions et rôles sociaux varient. Ensuite, l’hétérogénéité que recouvre la notion de jeunesse doit elle aussi être interrogée quand on aborde les questions de participation et de représentation politiques et sociales. Enfin, ce type de démarche invite à examiner les logiques sociales et politiques et, partant, les conflits et les enjeux qui accompagnent les processus de participation et de représentation des populations dites « jeunes », que ce soit au sein de la « société civile » ou des institutions des États. Mécanisme de « bonne » gouvernance, l’encadrement institutionnel et associatif de la jeunesse est aussi un dispositif de contrôle et de gouvernabilité. Au Maghreb comme ailleurs, la participation politique des jeunes est souvent mesurée à l’aune de l’acte électoral. Les données disponibles concernant les scrutins qui se sont déroulés depuis 2011confirment de faibles taux de participation qui se situent en dessous de ceux déjà relativement faibles des électeurs plus âgés. La sociologie électorale a révélé cette tendance à l’abstention caractéristique de cette catégorie d’âge dans de nombreux pays et à différentes époques. Dans le cadre des pays qui nous intéressent ici, l’abstention ne peut être interprétée que comme un manque de civisme, mais analysée plutôt comme un révélateur de la relation de l’électeur au système politique, de l’emprise des partis politiques sur la société et de la perception des enjeux électoraux. Dans certains pays comme le Maroc et la Tunisie, des mesures de discrimination positive ont été prises par les gouvernements pour offrir une plus large représentation politique aux jeunes. Elles sont perçues comme des réponses aux mobilisations de l’année 2011 qui ont été présentées souvent comme des mouvements contestataires de jeunes. Or, ces perceptions appellent deux remarques : d’abord, on sait très peu de choses sur les débats, les enjeux et les luttes qui ont entouré ces mesures visant à améliorer la représentation politique de cette catégorie de la population ; ensuite, la présence proportionnellement importante de jeunes avait déjà été signalée lors de protestations et de troubles récents, mais antérieurs à la vague du « Printemps arabe ». Les carences des dispositifs démocratiques en matière de représentativité des identités et des intérêts se voient souvent compensées ou tout au moins mises en évidence par l’expression du mécontentement sous la forme protestataire. La jeunesse est avant tout l’âge de la protestation. La notion de protestation est elle aussi polysémique. Ses implications varient en fonction de ses répertoires d’action (violents ou pacifiques), de ses visées de changement (partiel ou subversif) et sa durabilité (ponctuelle ou continue). Elle peut s’exprimer sous diverses formes (la prise de parole, la marche, l’occupation, la dérision, l’humour, l’insulte, la violence physique, etc.), dans divers espaces physiques (la rue, les places, les amphithéâtres, les murs et théâtres), et virtuels (les murs des réseaux sociaux du web 2.0). La prégnance de cette dimension contestataire dans les actions collectives portées par les jeunes n’épuise pas la participation de ceux-ci dans des actions collectives. Le tissu associatif a connu un essor conséquent au cours de ces dernières années dans tous les pays du Maghreb . Le tissu associatif local, les coopératives, les réseaux informels d’entraide et d’assistance, de production de biens et de services, de capacitation et de sensibilisation de publics pour défendre une cause ou promouvoir des activités de natures très diverses accueillent ou sont impulsés aussi par des jeunes. Il fait souvent appel à des savoirs faire, « professionnels » ou pas, qui sont autant de capacités d’expertises et de ressources pour l’action collective. Il constitue un espace de participation au sein duquel la politisation quand elle n’est pas explicite n’en est pas pour autant complètement absente. C’est dans ce sens qu’on pourra envisager son analyse en complémentarité ou en substitution du champ politique. En effet, si certains jeunes ne s’engagent pas d’autres au contraire sont pluri-engagés. Enfin, les mass médias, les blogs et les réseaux sociaux sur internet jouent un rôle, dans les différentes phases qui ponctuent les processus d’engagement individuel et de mobilisations collectives, qui mérite d’être creusé. Mais contrairement à la télévision, le net est aussi un espace au sein duquel l’action collective est produite, même si les liens entre l’action connective et l’action collective sont encore sujet à discussion, puisque chaque cas livre ces propres conclusions au-delà de certaines caractéristiques communes. Quid dès lors de l’idée si répandue de la dépolitisation et de l’apathie de la jeunesse maghrébine ?


Objectifs
Les journées d’études prétendent aborder ces questions en présentant des études de cas de participation et représentation sociale et politique de la jeunesse. Celles-ci ne sont pas limitées au Maroc et peuvent porter sur les pays du Maghreb, voire du pourtour méditerranéen ou d’Afrique subsaharienne.

Lire plus...
À titre indicatif, nous encourageons les communications qui aborderont les thèmes suivants :

1) La présence et la participation des jeunes dans les partis politiques

2) L’attitude des jeunes vis-à-vis des élections

3) Le renouvellement du personnel politique et les générations politiques

4) Les dispositifs institutionnels de représentation politique et sociale réservés aux jeunes

5) La présence des jeunes au sein des instances élues

6) Les associations et les mouvements de jeunes

7) La participation des jeunes au sein du tissu associatif de promotion de services et d’entraide à la population

8) Les jeunes et les organisations de lutte pour la reconnaissance de droits

9) Les organisations et les mouvements étudiants

10) Les mouvements radicaux de transformation sociale et politique : altermondialistes, anarchistes, islamistes, marxiste-léniniste…

11) Les jeunes et l’usage de la violence à des fins politiques

12) Les organisations de veille démocratique ou de vigilance de la gouvernance

13) Les « sous cultures » jeunes et leur politisation

14) Les rôles des jeunes des diasporas et des réseaux transnationaux de militants


Propositions de communication
Les résumés des propositions de communications (500-1000 mots) devront exprimer clairement la problématique et les hypothèses de départ, préciser les choix méthodologiques, les terrains et les sources utilisées, et énoncer les principales conclusions.
Les résumés seront accompagnés des coordonnées et d’une brève biographie ou d’un CV du ou des auteurs décrivant leur trajectoire de recherche en rapport avec les thèmes des journées d’études.

Les propositions de communications devront être envoyées à :
Thierry DESRUES (tdesrues@iesa.csic.es) et Marta GONZALEZ (martagonzalez@iesa.csic.es)


Organisation des journées de travail :
Les participants dont les communications auront été acceptées, devront prendre en charge leurs frais de déplacement et de séjour hormis les déjeuners des 28 et 29 Septembre.


Publication :
Une sélection de communications fera l’objet d’une publication dans un ouvrage ou un dossier de revue.

Ces journées sont organisées avec le soutien du projet de recherche “Problèmes publics et militantisme au Maghreb. La participation sociale et politique des jeunes dans leur dimension locale et transnationale”, financé par le Ministère espagnol de l’Économie et de la compétitivité (CSO2014-52998-C3-2-P).

Leave a Reply

Your email address will not be published.